samedi 4 novembre 2017

Au secours, ma classe est "bavarde"!

Les élèves entrent dans la classe et chuchotent... Le temps d'une vérification du logiciel de cantine et ces charmants bambins sont déjà tous à s'installer bruyamment. Certains s'assoient, d'autres attendent un signal, d'autres commencent à chahuter gaiement... Dans les couloirs ou en sortie, ils ne savent pas parler normalement, ils crient pour communiquer entre eux... Cette classe bavarde aura-t-elle raison de ma patience?

Nous avons tous et toutes eu au-moins une fois dans notre carrière ce genre de classes qui nous semble plus bruyant et plus agité que les autres, qui ne semble pas disposé à rester calme quoi que nous fassions...pas même lorsque vous bougez les étiquettes-prénoms dans la "zone rouge"... pas même lorsque la directrice ou le directeur entre dans la classe...pas même lorsque vous décidez de respecter vos principes du "zéro tolérance"! ILS N'ARRÊTENT JAMAIS DE PARLER...JAMAIS!

Cette situation n'est pas seulement fatigante nerveusement et physiquement mais elle rend tout apprentissage serein presque impossible. Quel temps perdu à attendre le silence, recadrer les plus bavards, répéter, bref gendarmer au lieu d'enseigner et de faire apprendre?

Nous pensons parfois avoir déjà tout essayé: Punir les perturbateurs, valoriser les élèves calmes et attentifs, attendre le silence avant de parler, utiliser une échelle de comportement, crier (ce qui n'est pas le plus efficace pour apaiser...)... mais cela ne fonctionne toujours pas. Les élèves ne se sentent pas concernés par la gestion du climat serein et préfèrent s'amuser. 

La question du bavardage en classe est directement liée à celle du climat de classe. L'important est donc d'être bien conscient que ces objets sont d'ordre systémique. Il n'existe pas de recette miracle mais les recherches nous permettent d'identifier différents axes sur lesquels nous pouvons agir. L'approche systémique du climat de classe doit être vue telle une boîte à outils que chaque enseignant peut utiliser en cohérence avec son propre contexte mais aussi sa propre sensibilité. Nous vous encourageons donc à vous questionner sur les facteurs d'amélioration du climat de classe décrits par Rosée Morissette. Lesquels actionnez-vous déjà? Lesquels pouvez-vous investir davantage?

Ce nouvel article, à prendre en compte dans le cadre d'une problématique plus globale de climat de classe, vous apporte quelques "nouvelles" pistes à explorer et se focalise sur le bavardage...

1: Identifiez les temps où l'on peut parler de ceux où l'on ne peut pas

De nombreux élèves ont besoin de repères visuels. Identifiez clairement, pour chaque activité, si les élèves ont le droit de travailler en groupe en parlant calmement, de chuchoter ou de faire silence. Il existe pour cela de nombreux supports tels que ceux-ci.
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Source: Lutin Bazar

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Source: Laclocheasonne
J'utilise pour ma part depuis peu l'excellent site internet de gestion de classe classroomscreen qui me permet d'afficher les consignes au vidéoprojecteur: travailler en groupe et parler calmement, chuchoter en binômes ou faire silence. Classroomscreen est un formidable outil  car il comporte également un audiomètre, des feux tricolores, une fonction "tirage au sort", un minuteur, un éditeur de textes, de dessins et d'autres applications très utiles au quotidien.
Si votre classe est équipée d'un vidéoprojecteur et d'internet, essayez... vous ne pourrez plus vous en passer!

Il est également souhaitable, afin d'ancrer très clairement les choses, de lister avec vos élèves les activités durant lesquelles ils ont le droit de parler, celles durant lesquelles ils ont le droit de chuchoter et celles durant lesquelles ils doivent faire silence. Une affiche ainsi réalisée par la classe vous permettra de soutenir cet apprentissage tout au long de l'année.

Un dernier conseil enfin: identifiez le niveau sonore attendu avant chaque nouvelle activité afin d'expliciter clairement vos attentes à tous les élèves.

2: Utilisez un indicateur de niveau sonore

Là encore, il en existe de nombreux sur internet. En voici de bien jolis...
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Merci encore à Lutin Bazar

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Source: Mon Ecole


Si vous avez la chance d'avoir un vidéoprojecteur, en voici un que j'apprécie particulièrement: Too noisy on line.
Vous pouvez également utiliser celui de Classroomscreen, mais il est malheureusement beaucoup moins visuel.
Dans un style beaucoup plus ludique, disons même un peu trop ludique, je partage aussi Bouncy Balls. J'avoue ne pas avoir osé utiliser cette application car je crains que les élèves ne cherchent à faire bouger les petites balles plutôt qu'à les immobiliser... N'hésitez-pas à me laisser vos commentaires si vous vous lancez dans quelques tests!

3: Utilisez des "capteurs d'attention":

Ne jamais commencer une séance avant d'obtenir le silence complet. Voici un principe que nous connaissons tous! Mais comment s'assurer que nous pouvons obtenir RAPIDEMENT silence et attention de tous? Comment ne pas perdre de nombreuses minutes précieuses à attendre coûte que coûte ce silence salvateur? Les "capteurs d'attention" pourront peut-être vous y aider. Il s'agit de petits rituels de rassemblement qui attireront l'attention de vos élèves sur le fait qu'il faut urgemment se mettre en situation d'écoute.
Il en existe de nombreux:
-Des petites phrases bien choisies et entraînantes: "Les yeux et les oreilles sur moi dans 3, 2, 1!",
-Des expressions d'échanges telles que lorsque vous dites "Classe", la classe doit répondre "OUI" et se taire. Si vous dites "Classe-classe" les élèves doivent répondre "OUI OUI" et ainsi de suite.
Règles du regroupement des oursons
Source: http://maitresse-myriam.eklablog.com
Il en existe beaucoup d'autres, vous pouvez même les inventer et demander aux élèves de les inventer! ("Banane et chocolat"..."tout le monde aux abois"; "Hocus Pocus"..."tout le monde focus"; "Pourquoi sommes-nous là?"..."pour apprendre")
-Des consignes courtes telles que lorsque vous dites "Donnez-moi vos mains!" les élèves doivent lever une main en l'air avec les doigts bien écartés pour montrer qu'il vont respecter les cinq consignes des cinq doigts de la main (1: les yeux vers la maîtresse, 2: la bouche fermée, 3: les mains relâchées, 4: se tenir droit, 5: écouter).

Pour parvenir à rendre cet outil efficace, il vous faudra entraîner votre classe et surtout respecter rigoureusement la contrainte d'attendre que l'ensemble des élèves soit silencieux et attentif. Entraînez-les à répondre ou à réagir le plus vite possible dans toutes les situations d'apprentissages, qu'il s'agisse d'activités individuelles ou de travaux de groupes. Faites constater les progrès et l’intérêt pour le climat de la classe.

Dites-vous qu'un élève qui parle à son voisin ne pourra pas comprendre les consignes que vous être en train de donner, qu'il perd son temps. Il est donc primordial de vous assurer de l'attention de tous avant toute intervention. Jean-Philippe Lachaux, dans son ouvrage "les petites bulles de l'attention" nous apporte quelques pistes concrètes pour travailler l'attention avec nos élèves. N'hésitez pas à aller consulter l'article.

  3: Intégrez des temps de parole et d'échanges durant la journée de classe

Les élèves ont besoin de parler et d'échanger pour apprendre. Les nouvelles connaissances en neurosciences l'attestent aujourd'hui. La coopération entre élèves ne peut plus être considérée comme un "petit plus" à proposer aux élèves s'ils se comportent bien. Donnez-leur quelques moments d'échanges bien cadrés et productifs, ils en ont besoin pour acquérir les compétences les plus complexes, transférer des apprentissages, résoudre des tâches complexes, créer, réaliser des productions de qualité, comprendre le monde, s'interroger, vivre le conflit cognitif qui leur permettra d'apprendre...

Pour en savoir plus, je vous invite à poursuivre votre lecture sur la page "coopération et travaux de groupes".

Au-delà de la coopération entre élèves, vous pouvez également proposer à vos élèves des rituels durant lesquels ils auront la possibilité d'échanger.

Par exemple, lorsque vous posez une question à la classe, donnez un temps de réflexion individuel puis proposez trois minutes d'échanges en binômes. Pour un retour rapide au silence, utilisez vos "capteurs d'attention" ou comptez à rebours. 

Un autre exemple consiste à donner des temps de coévaluation durant lesquels les élèves échangent sur la qualité de leur travail et réfléchissent à une évaluation la plus juste possible. Ces temps de réflexion et de métacognition sont fondamentaux dans la construction de leurs apprentissages!

  4: Restez clair(e) et constant(e)!

De tous ces beaux conseils, voici peut-être le plus important et parfois le plus difficile à suivre. Dans le cadre de ses recherches sur le climat de classe, Rosée Morissette aborde l'axe de la "sécurité affective" comme facteur d'amélioration du climat de classe. Les élèves respecteront d'autant mieux des consignes de classe que celles-ci seront constantes et toujours suivies. Le cadre donné doit être sécurisant pour les élèves. Imaginez-vous arriver en classe un matin, très motivé(e) et décidé(e) à ne rien lâcher pour que le calme règne dans votre classe. Effectivement, vous tenez bon, vous utilisez les "capteurs d'attention" et les indicateurs de niveau sonore, vous réagissez rapidement en cas de non respect...Bref, tout se passe comme vous le souhaitez! Pourtant, le lendemain, vous n'arrivez pas à l'école dans la même forme et ne parvenez pas à suivre les mêmes règles que la veille. Vous laisser quelques écarts se produire, les élèves bavardent plus longtemps. Ils sentent que vous êtes moins rigoureux(se) que la veille.

Tout ceci est affaire de dosage et de respect de soi-même. Vous savez que vous devez rester constant(e) mais aussi qu'il vous faut maintenir le même niveau d'exigences tout au long de la semaine et de l'année. Prenez donc les mesures qui vous conviennent le plus sincèrement possible. N'allez pas trop loin dans une rigueur qui ne vous convient pas. Sentez les choses et adaptez les règles à vos élèves ET à vous-même. Ainsi vos chances d'offrir à vos élèves la "sécurité affective" indispensable à leurs apprentissages sera plus grande.

Pour terminer: Le calme se communique! Rester calme permettra d'éviter l'escalade sonore.  Ceci est l'affaire de nos fameux "neurones miroirs" qui nous permettent d'agir à la manière de notre interlocuteur. Si vous êtes calme, la classe se mettra plus facilement à votre diapason. Si vous êtes énervé(e), la classe fera de même!


Sources:
-Rosée Morissette "accompagner la construction des savoirs" Editions Chenelière
-Nathalie Francols, 2017, "Prof et élèves, se faire confiance: situations quotidiennes à comprendre et à dénouer", Editions Chronique sociale











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